dimanche 16 août 2009

HAITI /CORRUPTION

La justice suisse ordonne la restitution à Haïti des fonds détenus par les Duvalier


Les avoirs (environ 6 millions et demi de dollars) détenus en Suisse par la famille Duvalier sont sur le point d’être restitués à Haïti, selon une nouvelle décision adoptée, ce vendredi 14 août 2009, par les autorités helvétiques.

En ce sens, un montant de sept millions de francs (6 510 000.00 dollars américains au taux de change du 14 août 2009), gelé dans les banques suisses depuis 2002, seront remis aux autorités haïtiennes à une date non encore précisée.

En prenant cette décision, le Tribunal pénal fédéral (TPF) a rejeté le recours d’une fondation de la famille de l’ex-dictateur, qu’il assimile à une « organisation criminelle ». Le TPF estime que la structure, mise en place par l’ancien dictateur Jean-Claude Duvalier et ses proches, doit être qualifiée d’organisation criminelle.

Cette structure consistait à « user du pouvoir absolu du chef de l’État pour faire régner un climat de terreur en Haïti et procurer à ses membres des revenus considérables par le détournement systématique des fonds publics », poursuit le Tribunal pénal fédéral.

Dans un arrêt rendu, le 12 août 2009, le TPF a même jugé hors-la-loi le clan des Duvalier, rapporte la presse helvétique.

Pour justifier sa demande de restitution, formulée par une fondation enregistrée à Vaduz, la famille Duvalier arguait que les fonds détenus en Suisse « avaient pour unique origine la fortune personnelle de Simone Duvalier », la mère de Jean-Claude Duvalier. Un argument écarté par le TPF.

« Il est établi que Simone Duvalier était membre de l’organisation criminelle, dirigée par son mari François Duvalier, puis par son fils Jean-Claude, en sa qualité de bénéficiaire des détournements de fonds opérés systématiquement par cette organisation », estime le TPF, cité par la presse suisse.

Dans son arrêt, la Cour relève que « les fonds rendus à Haïti devront être utilisés de façon transparente, au bénéfice de la population haïtienne, par le biais de projets humanitaires ou sociaux à réaliser et à gérer d’entente entre les autorités et les organisations non gouvernementales (Ong) ».

Jean-Claude Duvalier et son entourage sont accusés d’avoir détourné plus de 100 millions de dollars sous le couvert d’œuvres sociales avant la chute de sa dictature le 7 février 1986.

HAITI / RESTITUTION FONDS Duvalier

Le CEDH félicite les instances suisses


Communiqué du CEDH

Soumis à ‘reshinfo.blogspot.com’ le 14 aout 2009

Le 12 août 2009, le Tribunal Pénal Fédéral de Berne a rendu son verdict sur le sort des fonds Duvalier encore détenus dans les Banques Suisses. Après des années d’enquêtes, de démarches et de procédure, elle a décidé que ces fonds, reliquat d’une immense fortune, siphonnés pendant 29 ans par la famille Duvalier devaient être rendus au peuple haïtien.

Il s’agirait de 7 millions de francs suisses soit un peu plus de 5 millions de dollars US. « Le Tribunal pénal fédéral a donné son feu vert à la restitution à Haïti des avoirs détenus en Suisse par la famille Duvalier. Il a rejeté le recours d’une fondation de la famille de l’ex-dictateur, qu’il assimile à une "organisation criminelle ».

Le Centre Œcuménique des Droits Humains qui s’est joint à d’autres organisations haïtiennes et au collectif des organisations suisses pour participer à la documentation et la présentation du cas Duvalier devant la Cour Suisse félicite , au nom du peuple haïtien, les instances suisses d’avoir engagé cette lutte car la signification et les conséquences de cette sentence du plus haut tribunal suisse en cette circonstance sont évidentes.

Il faut souligner l’importance que cette décision prend au niveau international pour envoyer le message aux responsables des état, anciens, présents et à venir, que voler l’Etat est un crime et que les abris qui existaient jusqu’à maintenant se réduisent de plus en plus, grâce à la collaboration des états, mais aussi, à l’extension de plus en plus grande des juridictions internationales.

Nous savons aussi que le succès de tout plan de développement du pays exige nécessairement des mesures concrètes et tenaces contre la corruption, car la corruption secrète la corruption. La décision de la Cour Fédérale de Justice Suisse est un précédent qui annonce qu’il est possible de mettre fin à l’impunité.

Jean-Claude Bajeux, Dir Exe
14 août 2009

HAITI / SALAIRE MINIMUM

Les ouvriers s’acharnent : «200 goud tou swit»


Par Sylvestre Fils Dorcilus

Des ouvriers du secteur de la sous-traitance ont, une nouvelle fois, investi les rues de la capitale, lundi et mardi, pour obtenir du Parlement le rejet des objections du gouvernement contre la loi fixant le salaire minimum journalier à 200 gourdes.

Ce mardi, tout était au point mort au Parc industriel métropolitain. Aucune entreprise n’a fonctionné. Et ce sera le cas encore ce mercredi. Constatant que les mesures adéquates n’ont pas été prises « pour garantir la sécurité des employés et des entreprises, l’Association des industries d’Haïti (Adih) a décidé que les entreprises d’assemblage et de textile resteront encore fermées le mercredi 12 août 2009 ».

Cette décision de l’Adih fait suite à la quatrième manifestation émaillée de quelques scènes de violence organisée par des milliers d’ouvriers du Parc industriel en une semaine, soit du lundi 3 au lundi 10 août en cours, pour la promulgation de la loi portant leur salaire minimum journalier à 200 gourdes.

Mécontents de la séance déroulée à la Chambre basse, le 4 août dernier, une séance au cours de laquelle 55 députés ont voté en faveur du rapport de la commission Affaires sociales qui recommande un salaire minimum « médian de 150 gourdes », les ouvriers – supportés par des étudiants de la faculté des Sciences humaines de l’Université d’État d’Haïti (UEH) – ont regagné les rues de la capitale, lundi et mardi, et annoncé une mobilisation « illimitée » jusqu’à ce qu’ils obtiennent satisfaction.

« Nous sommes à nouveau dans les rues ce lundi pour continuer notre mobilisation entamée depuis une semaine. Nous voulons montrer aux patrons que ce ne sont pas les étudiants seulement qui sont capables de manifester dans les rues. D’ailleurs, nous sommes les victimes directes », ont déclaré des manifestants.

Se plaignant des conditions de travail jugées « pénibles » dans les usines et adoptant des attitudes moins pacifiques que lors des mobilisations antérieures, les ouvriers-manifestants n’ont cessé de crier à l’unisson tout le long de leur parcours : « Vive 200 gourdes ! À bas 150 gourdes ! Il faut que les patrons, le président Préval et les parlementaires prennent conscience de notre état lamentable ».

Arrestations, incendies de véhicules…

Les ouvriers, renforcés par d’autres secteurs de la vie nationale, dont les étudiants dans le cadre de leur mouvement, ont eu recours, lundi et mardi, à la violence et lancé des pierres et des tessons de bouteille en direction des forces de l’ordre (PNH et Minustah) à Delmas 33.

Ils ont par la suite dressé des barricades de pneus enflammés pour exiger, cette fois, la libération de deux manifestants interpellés au niveau du Parc industriel, dont un étudiant.

En fait, tout a débuté à l’intérieur de la Sonapi, vers les 7 heures du matin, quand les ouvriers – « à l’appellation de Guerchang Bastia, étudiant en 3e année de sociologie à la faculté des Sciences humaines, et Patrick Joseph, membre d’une organisation populaire dénommée « Komite pou remanbre Divivye » –, ont surpris leurs patrons respectifs en lançant une manifestation improvisée, en dépit d’un fort dispositif de sécurité mis en place par les forces de l’ordre.

Accusés de troubler l’ordre public, Guerchang Bastia et Patrick Joseph, incapables de s’identifier, ont été interpellés au Parc, a informé le commissaire de police de Delmas, Carl Henry Boucher. Ils étaient vite conduits au commissariat de Delmas 33, avant d’être confiés, quelques heures plus tard, à la justice pour les suites judiciaires.

Une décision qui a provoqué l’ire des manifestants qui ont tenté de force, mais vainement, d’obtenir leur libération. Car une fois auditionnés au parquet de Port-au-Prince – par le substitut du commissaire du gouvernement, Félix Léger –, les deux accusés ont été transférés au Pénitencier national.

Lundi, aux environs de 11 heures, alors que la tension montait à Delmas 33 dans les parages du commissariat, un vent de panique régnait parallèlement à l’avenue Christophe. Deux véhicules d’État (un bus Hyundai de la Direction générale des impôts et une Toyota Land Cruiser du parquet) ont été incendiés dans la foulée, non loin de la faculté des Sciences humaines.

Les pare-brise de plusieurs véhicules privés, dont celui du service du chargé d’Affaires de l’ambassade des États-Unis en Haïti, Thomas C. Tighe, ont été endommagés à coups de pierre à Delmas 33. Un policier a été également touché au bras.

Ce mardi, en dépit de la fermeture du Parc industriel, la situation n’a pas été différente. En effet, les ouvriers et les étudiants avaient regagné les rues, avec le même leitmotiv : « le maintien du salaire minimum journalier à 200 gourdes tel que voté initialement par les deux Chambres ». Les manifestants ont lancé un ultimatum de 24 heures au président René Préval et aux parlementaires pour qu’ils retournent sur leur position et « éviter le pire ».

Les agents de différentes unités de la Police nationale d’Haïti (Udmo, Cimo, Bim...) secondés par les soldats de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah) ont dû intervenir, en faisant usage de grenades lacrymogènes pour disperser les manifestants. Cependant, aucun incident majeur n’est à déplorer.

Rappelons qu’il est prévu, ce mercredi, à la Chambre basse, la reprise de la séance du mardi 4 août, à laquelle une vingtaine de députés reprochent des vices de procédure. Cette fois, le vote, a-t-on annoncé, se fera autour de l’adoption ou non des objections du président de la république, René Préval.

PORT-AU-PRINCE / AFFAIRES / INSÉCURITÉ

Centre-ville : derrière les comptoirs en fer forgé, la peur persiste...

Par Sylvestre Fils Dorcilus

Le centre commercial de la capitale vit toujours dans l’inquiétude. Et pour cause : les actes de banditisme n’ont pas cessé. Mercredi et jeudi, des citoyens, dont un ancien officier des Forces armées d’Haïti dissoutes et un ancien directeur général de la Camep, sont agressés par des bandits armés et circulant à moto Pourtant, des agents des forces de l’ordre (PNH et Minustah) patrouillent régulièrement dans les zones réputées les plus dangereuses.

Le climat d’insécurité semble vouloir atteindre de nouveau des proportions alarmantes dans plusieurs zones de la capitale et, en particulier, au centre commercial. Aux agressions physiques, kidnappings, meurtres, s’est ajoutée une nouvelle forme d’attaque contre le secteur commercial : le braquage des magasins et autres entreprises commerciales.

2 heures 45. Mercredi. Une cliente a été interdite – par un agent de sécurité – d’entrer dans une banque commerciale à la rue Geffrard, à Port-au-Prince. « Madame, vous ne pouvez pas entrer, c’est fermé. Généralement, on ferme à 3 heures, contrairement aux autres succursales qui se trouvent ailleurs », lui lance, sur un ton ferme, l’agent de sécurité.

Même scénario dans une maison de transfert située non loin de la banque commerciale. « On ne reçoit plus de clients à cette heure. On va fermer sous peu, Madame. Ici, on n’ouvre pas au-delà de trois heures. Vous savez, la machine de l’insécurité n’épargne personne », explique une réceptionniste qui s’apprête à plier bagages.

Selon Patrick, un grossiste rencontré dans son entreprise à la rue Bonne Foi, à côté des grands voleurs qui opèrent avec des moyens de transport rapide (motocyclette) et des armes à feu dans le centre commercial de Port-au-Prince et les environs, il y a les voleurs à la tire. Ces derniers, poursuit-il derrière son comptoir en fer forgé, sont en grand nombre dans les environs immédiats des grandes institutions commerciales (banques, maisons de transfert, magasins, etc.).

« Il y a quelques jours, des hommes armés, encagoulés, ont fait irruption dans une maison de transfert. Ils ont emporté beaucoup d’argent, informe Patrick. Plusieurs propriétaires et employés d’entreprises commerciales sont victimes en maintes occasions ». Autant de cas et de raisons d’avoir peur, estime le commerçant, précisant que « devant l’ampleur de ces actes, les commerçants (grossistes et détaillants) sont contraints de fermer leurs entreprises très tôt ».

« C’est monnaie courante. À longueur de journée, les malfrats opèrent sans crainte, dès fois sous les regards impuissants des policiers », déplore Mario, employé d’un magasin. Cela a pour conséquence d’entretenir l’inquiétude chez les commerçants qui, nombreux, envisagent de s’installer ailleurs.

Entre-temps, dès 2, 3 heures de l’après-midi, le centre-ville commercial se ferme. Par peur, confirme Mario.